Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/106

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discrètement, quand Antoine s’aperçut de sa présence. En la voyant, il fut pris d’un véritable accès de désespoir. Il pleurait, il gémissait. Mme  Bruvannes, épouvantée, se précipita vers lui. Antoine était en train de rédiger son testament.

Le soir même, le docteur Tullier fut appelé auprès d’Antoine. Il le palpa, l’ausculta, l’examina de fond en comble. Sa première ordonnance fut de prescrire un repos absolu, un changement complet d’habitudes. À cette condition, Tullier voulait bien épargner à son malade le traitement dans un sanatorium et il lui avait permis de rester à Paris, mais Antoine s’engageait à suivre le régime le plus sévère. Antoine s’y est résigné assez aisément et, déjà, il va un peu mieux, mais l’état de neurasthénie où il est réduit demandera des soins assez longs.

Telles sont les nouvelles que me donne la lettre de ma mère, mais elle contient encore autre chose. Dans sa réclusion, Antoine s’ennuie terriblement. La pauvre Mme  Bruvannes s’efforce en vain de le distraire. Ce n’est pas toujours facile. Antoine ne veut recevoir aucun de ses amis actuels. Par contre, et par un caprice de malade, il désirerait vivement me revoir et se réconcilier avec moi. Ne consentirais-je pas à oublier ses torts et à aller lui rendre visite ? Ma mère me transmet la requête de Mme  Bruvannes et n’y ajoute aucun commentaire. Elle tient toujours à me laisser libre d’agir à ma guise, mais je sens qu’elle compatit vivement aux inquiétudes de Mme  Bruvannes. Néanmoins, je ne