Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/349

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aussi à Mme  de Lérins, mais que lui aurais-je dit ?


En mer, même date. — L’Amphisbène file rapidement sur une mer calme. Après le déjeuner, je suis descendu dans ma cabine. J’ai besoin de solitude, de silence. Du couloir, en passant, j’ai jeté un coup d’œil dans la cabine qu’occupait Laure. La porte était ouverte. La femme de chambre de Mme  Bruvannes était en train de fermer les armoires, de mettre en ordre les objets. Mes yeux se sont remplis de larmes.


Même date. — Nous serons ce soir à Malaga. Déjà quatre jours ! Le souvenir m’est revenu de ma dernière journée et de ma dernière soirée d’Alger. J’ai erré à travers la ville, comme une âme en peine. Ah ! je comprends maintenant le vrai sens de cette expression ! Je n’aurais pu supporter la compagnie d’Antoine, pas plus que celle de Mme  Bruvannes, des Subagny ou de Gernon. Comme il faisait une chaleur accablante, personne heureusement ne m’a proposé de descendre à terre avec moi. Alger brûlait littéralement, ce jour-là. Le dôme de la mosquée de la Pêcherie semblait fondre dans l’air ardent. J’ai pris une voiture et je me suis fait conduire au Jardin d’Essai. Il était désert. J’ai marché sur une terre dure et craquelée et je me suis promené longtemps dans une allée d’arbres étran-