Page:Régnier - La Canne de jaspe, 1897.djvu/79

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pelai M. de Nouâtre. Pas de réponse. Je m’avançai à tâtons dans l’ombre. Un peu de braise rougeoyait dans l’âtre. J’y allumai un flambeau pris sur une console où ma main l’avait heurté. La flamme grésilla. Un corps, étendu sur le parquet, gisait la face contre terre. Je le retournai à demi et reconnus M. de Nouâtre. Ses yeux grand ouverts me regardèrent vitreux de leurs onyx éraillés. Aux coins de ses lèvres moussait une écume rousse. Sa main que je tâtai remplit la mienne de sang ; j’écartai le manteau noir qui enveloppait le cadavre. Il portait au ventre une profonde blessure faite d’un coup d’épée. Je n’éprouvais nulle terreur, une violente curiosité me saisit. Je regardai avec attention autour de moi. Tout était en ordre dans la chambre. Le lit ouvrait ses draps blancs. Sur le parquet à losanges de bois clair se dessinaient des traces de pas boueux ; ils partaient de la fenêtre et se dirigeaient vers l’endroit où gisait M. de Nouâtre. Une bizarre odeur de cuir et de corne empestait l’air. Le feu crépita ; deux tisons rapprochés se rallumèrent et je m’aperçus alors que le misérable était tombé les pieds dans l’âtre et que