Page:Régnier - La Cité des eaux, 15e éd.djvu/74

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Puis il s’assit en face d’Apollon,
Modeste et les yeux clignés
Devant le Dieu magnifique et vermeil
Avec sa lyre d’or debout dans le soleil.

Marsyas chanta.
Ce fut d’abord un chant léger
Comme la brise éparse aux feuilles d’un verger,
Comme l’eau sur le sable et l’onde sous les herbes
Puis on eût dit l’ondée et la pluie et l’averse,
Puis on eût dit le vent, puis on eût dit la mer.
Puis il se tut, et sa flûte reprit plus clair
Et nous entendions vibrer à nos oreilles
Le murmure des pins et le bruit des abeilles,
Et, pendant qu’il chantait vers le soleil tourné,
L’astre plus bas avait peu à peu décliné ;
Maintenant Apollon était debout dans l’ombre,
Et dédoré, et d’éclatant devenu sombre,
Il semblait être entré tout à coup dans la nuit,
Tandis que Marsyas à son tour, devant lui,
Caressé maintenant d’un suprême rayon
Qui lui pourprait la face et brûlait sa toison,
Marsyas ébloui et qui chantait encor
À ses lèvres semblait unir un roseau d’or.