Aller au contenu

Page:Régnier - Les Jeux rustiques et divins, 1897, 2e éd.djvu/129

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
125
LES ROSEAUX DE LA FLUTE


L’ÎLE


La terre est douce autour de la montagne haute,
Les chardons de la grève et l’écume des côtes
Échangent leurs flocons de bourre et de marée ;
Le soc luit au sillon et la barque est ancrée,
Le blé déferle à la vague qui se recourbe,
Et le filet déborde et la corbeille est lourde ;
La châtaigne est pareille aux pointes de l’oursin.
Et l’algue chevelue oscille entre des mains
Invisibles qui la déroulent et la peignent ;
Et, dans l’eau fabuleuse et glauque où tu te baignes,
Une sirène bleue émerge du flot vert ;
Et, dans la conque où chante au loin toute la mer,
J’entends, rumeur de houle et rumeur de labour,
La voix mystérieuse et double de l’Amour.