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LES JEUX RUSTIQUES ET DIVINS


LES FONTAINES


Les trois fontaines d’or qui chantaient dans ma vie
Sont mortes à jamais dans la beauté d’un soir
Où la Tristesse en pleurs sourit à qui l’oublie,
Et la Joie a baisé la bouche de l’Espoir ;

Car les fontaines d’or, de marbre et d’eau, en l’ombre
Du passé qui chantait par leurs voix et pleurait,
Car les fontaines d’or, de marbre et d’eau qui tombe
Goutte à goutte se sont tues dans la forêt.

Fontaines ! vous avez connu ma face pâle
Penchée éperduement sur vous, et de mes mains
Ont glissé tour à tour les rubis et l’opale
Dans l’onde sans réponse au cœur de vos bassins.

Toi qui dormais dans l’or des feuilles de l’automne,
Mystérieuse entre les roseaux et tout près
De l’allée où le vent qui passe et rôde écorne
Sa plainte suraiguë aux pointes des cyprès ;