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ARÉTHUSE


Écoute aussi le vent qui chante et rit et passe ;
Toute la forêt pleut de son rire clair,
La branche à la branche s’entrelace
Et là-bas, très loin, à travers
Les chênes bruns et les pins verts,
On dirait que le vent plus grave, c’est la Mer.

Souviens-toi de la plage et des algues et des coquilles
Où je dormais nue et tranquille
Et comme tu me regardais
Dormir ainsi sur la grève douce.

Le vent s’est tu et voici dans la source
Mon visage qui s’apparaît
Sous sa couronne de cheveux et de forêt ;
La source est un miroir lorsque le vent se tait ;
Mon voile autour de moi flotte comme une brume
De soleil et on la dirait l’ancienne écume
M’attestant, de la mer, naïve, provenue,
Et de toute ma chair tiède je me sens nue
Et l’eau m’attire…
Regarde comme elle est claire à la fontaine
À qui s’y mire
Et comme elle doit être fraîche à qui s’y baigne.

Me voici sur le bord de la fontaine claire
Et mes cheveux qui vont s’écrouler en arrière