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MASQUE TRAGIQUE


L’orgueil du haut cothurne et du sombre laurier
Qui grandit mon talon et couronne ma tête
M’a fait ainsi debout en ma force secrète
Tour à tour pâtre, roi, prêtre, esclave ou guerrier.

La pourpre me revêt d’un reflet meurtrier
Et l’âme du héros par le vers du poète
Seule anime à son gré ma bouche qui se prête
À qui veut par sa voix se dire ou se crier.

Tu verras au tréteau mon geste et ma mimique
Varier son visage et draper sa tunique ;
Et pour que j’apparaisse ainsi que tu me veux,

Durable en ta mémoire où vivra mon génie,
Il faut que mon cœur mêle en ces tragiques jeux
La sueur de ma chair et le sang de ma vie.