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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/197

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fête rustique. Il les fallut détromper et leur dire que notre compagnie n’était pas ce qu’ils supposaient, que nous avions autre chose à faire qu’à parader et à danser, et que le grand coffre qui nous précédait ne contenait pas nos défroques de rechange, mais le corps même de madame la duchesse de Grigny, qu’il s’agissait de conduire par le plus court à son repos éternel.

» Ce fut alors que nous apprîmes que nous avions fait fausse route et qu’il fallait couper par la traverse si nous prétendions gagner le château de monsieur de Barandin avant que la nuit fût trop avancée. Cette nouvelle fut très mal reçue dans les carrosses. Les drôles et les drôlesses qu’ils voituraient se plaignaient de la fatigue du chemin. Ils avaient le palais à sec, et la vue des bouteilles ranimait leur soif. Aussi ne fut-ce que bien muni qu’on repartit, au grand scandale de ces honnêtes gens, qui se signaient sur notre passage, avec le soupçon que nous étions peut-être des fous que l’on menait à quelque asile et à qui l’on avait persuadé, pour en venir à bout plus commodément, le jeu singulier où se prêtait leur insanité.

» Cependant, à mesure que nous cheminions assez péniblement par cette traverse qu’on nous avait