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Page:Régnier - Les Rencontres de monsieur Bréot, 1904.djvu/224

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poches, car il avait oublié le costume où il était.

– Quinze écus ! oui, monsieur, – continua M. de Bercaillé, – et je vous assure que ce n’est point pour les aller boire au cabaret, ni même pour m’acheter quelque fantaisie. J’ai renoncé à bien des choses depuis que vous m’avez vu et je ne suis plus guère dans les idées où vous m’avez connu, mais encore, monsieur, faut-il manger, car l’homme vit aussi de pain et non seulement des paroles tombées de la bouche de Dieu.

Et M. de Bercaillé poussa un long soupir du fond de son estomac creux.

– Vous vous étonnez, monsieur, de me voir en cet état, – reprit M. Floreau de Bercaillé, – non que mon manque d’argent ait de quoi vous surprendre, car c’est l’usage des poètes de n’être pas fortunés, mais ce qui doit davantage vous paraître singulier, c’est de ne me plus trouver ce beau feu pour l’impiété, qui me faisait jadis ne jamais prononcer le nom de Dieu sans aussitôt l’accompagner de ces railleries qui plaisaient tant à monsieur le prince de Thuines et qu’on se répétait à l’oreille. Ce fut en ces habitudes que vous me rencontrâtes, l’an dernier, à cette petite auberge où je fus heureux de reconnaître en vous quelqu’un