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Page:Régnier - Tel qu’en songe, 1892.djvu/17

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L’ARRIVÉE



Les fleurs sont mortes, une à une, en le vent rude.
Voici l’ombre et le temps et j’ai touché du pied
La terre du silence et de la solitude.

Les fleurs, graves ainsi qu’un espoir expié,
Périrent devant moi déjà, et voici mortes
Les fleurs, pâles ainsi qu’un visage oublié.

L’ombre lourde a pesé sur mes épaules fortes
Et le temps m’a conduit le long de son chemin
Sans m’arrêter au seuil et sans m’ouvrir les portes,

Ni la porte d’érable ou la porte d’airain,
Ni le calme tombeau, ni la maison heureuse
Qu’annonce le cyprès ou qu'indique le pin !

Ma vie, au fond des soirs, sereine ou douloureuse,
Est dans l’ombre à jamais comme un chemin perdu.
Le passé se récuse aux grottes qu’il se creuse