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LA DOUBLE MAÎTRESSE

grand-oncle M. de Galandot, et les questions que vous voulez bien m’adresser à son sujet vous honorent singulièrement. Avant d’y répondre, permettez-moi de vous louer à vous-même et d’admirer avec vous votre conduite, car, d’ordinaire, les neveux se comportent tout autrement, et en cela ils agissent avec une coupable ingratitude. Ils se hâtent d’oublier l’auteur de leur nouvelle fortune et ne lui savent guère gré que d’être mort. Encore lui reprochent-ils plus d’une fois d’avoir tardé. La coutume de ces héritiers est d’autant plus mauvaise que tout leur en recommanderait une autre, car, le plus souvent, le bienfait leur vient d’une main familière, et il y aurait quelque décence à continuer un peu au défunt les sentiments dont on faisait montre envers le vivant.

« Pour ce qui est de vous, Monsieur, les circonstances sont bien différentes. Vous n’avez point connu votre oncle et, comme vous me faites l’honneur de me le dire, vous en avez à peine entendu parler. Il ne tenait aucun rang dans vos affections et n’avait même aucune figure en votre souvenir, et voici que vous vous souciez de lui en donner une en votre reconnaissance.

— Il ne tient qu’à vous, Monsieur l’abbé, en effet, répondit M. de Portebize, de mettre fin à une incertitude qui, je dois le dire et comme vous le pensez bien, m’embarrasse moins le cœur que l’esprit, et qui est d’une espèce assez particulière. Je ne prétends point forcer la retraite posthume où, par la mort, s’est retiré M. de Galandot ; il me répugnerait même d’extorquer en quelque sorte