Page:Régnier Double maîtresse 1900.djvu/285

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fonctions à son gouvernement et à celui de tout l’État.

M. de Galandot, donc, ne manquait guère, chaque jour, de rencontrer un de ces grands carrosses qui vont par les rues au trot de leurs gros chevaux de parade et dont l’un des laquais porte l’insigne bien connu du parasol rouge. Il se rangeait prudemment pour le laisser passer. Les glaces, hautes ou baissées, montraient, assis au fond, l’un ou l’autre des Porporati allant à quelque affaire ou se rendant à quelque cérémonie.

Il y en avait de tous les visages : de très gros avec des mines de bons vivants, de très maigres avec des airs de mauvais morts, faces béates ou sournoises, bouffies ou décharnées. Parfois quelque fort nez orgueilleux brusquait un profil âpre. Des narines minces ou sèches disaient la ruse ou la prudence. Les étrangers prélassaient leur vanité française, redressaient leur morgue espagnole, affaissaient leur flegme tudesque. La plupart, pourtant, italiens et même romains. Ceux-là conservaient sous la pourpre l’enseigne de leur origine rustre, citadine ou seigneuriale. Il y en avait de nés dans une échoppe et de venus au monde dans un palais. Certains avaient porté la robe des ordres prêcheurs, mendiants ou politiques. Certains étaient entrés au cardinalat à portes ouvertes, certains à portes basses. Les négociations des cours ou les intrigues des antichambres avaient valu le chapeau à plusieurs. La bassesse des origines et l’illustration des naissances se coudoyaient dans la vertu ou dans l’ambition ; mais un