Page:Régnier Double maîtresse 1900.djvu/306

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chambres de Pont-aux-Belles désert réunies en poignée dans sa main, il avait fermé une dernière fois la porte du château pour n’y plus revenir. Il y avait laissé son enfance, sa jeunesse, toutes les choses familières des années lointaines, le dernier soupir de sa mère, le dernier rire de Mlle  Julie…

Le soleil tombait d’aplomb, M. de Galandot ôta sa perruque, s’épongea le front, tira sa montre et se mit en devoir de retourner chez lui. Il se sentait mal à l’aise, mais il voulut néanmoins passer par chez Cozzoli dont le bavardage le distrairait. De plus, le tailleur apprenait à sa pie à parler, et M. de Galandot s’intéressait aux progrès de l’oiseau loquace.

Pour aller à la rue del Babuino, M. de Galandot longeait les jardins de la villa Ludovisi, puis il n’avait qu’à descendre les escaliers de la Trinité-du-Mont pour se trouver place d’Espagne. Il marchait doucement, car la chaleur était accablante. Arrivé à la fourche de deux ruelles, il s’arrêta, hésitant de savoir laquelle il prendrait. Il y avait juste devant lui un gros caillou irrégulier qui semblait endormi dans la poussière. M. de Galandot le poussa du bout de sa canne. Il roula lourdement vers la ruelle de gauche et M. de Galandot l’y suivit sans se douter qu’il venait ainsi de décider du sort de sa vie. Il continuait à pousser la pierre du pied, tout en marchant. Il allait la tête basse et le dos voûté, comme cela lui arrivait fréquemment. Un léger bruit lui fit lever les yeux.

Une terrasse bordait la rue à cet endroit par un