Page:Régnier Double maîtresse 1900.djvu/318

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la fureur d’amants. Les caresses et les coups alternaient, étreintes et querelles d’où ils sortaient avec dans le regard je ne sais quoi de hargneux et de tendre.

Une fois ce premier regain passé, Angiolino retourna à ses occupations personnelles. Dans sa vie vagabonde il avait acquis les talents les plus divers et les plus utiles. Il avait déjà commencé au palais Lamparelli à en exercer quelques-uns ; mais il se trouvait maintenant en posture de montrer toute sa capacité et toute l’étendue de ses mérites. Le coquin avait, de plus, presque fort bonne mine. Il était bien vêtu et de figure agréable. On se fût, jusqu’à un certain point, trompé sur sa qualité, si je ne sais quoi de douteux n’eût averti et mis en garde. Une certaine souplesse d’échine le faisait saluer trop bas. Sa politesse était plus obséquieuse qu’il eût fallu pour qu’on n’y vît que l’effet de sa complaisance naturelle. Il tournait vite de la platitude à l’arrogance, de l’insolence à la bassesse. Il savait à merveille jouer le bouffon et n’ignorait pas l’usage qu’on peut tirer d’être plaisant. C’est par là qu’il avait capté le cardinal Lamparelli qui montrait un goût singulier pour la farce et la grimace. Il admirait chez Angiolino son habileté à esquiver un mauvais pas par une pasquinade. Il riait et oubliait que le drôle venait de regarder aux serrures ou d’écouter aux portes.

La vérité est qu’Angiolino était au fond de l’âme brocanteur, intrigant, espion et parfait rufian. Plus d’un grand seigneur ou d’un prélat recou-