Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/159

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qu’on accueillit beaucoup. Il dit qu’il ſerait des nôtres, ét ſa place fut à-côté de moi. Je ne tardai pas à m’apercevoir qu’on me-prenait pour une Jeune-avanturière ; je fus penetrée de confusion ; ét dès que j’entendis commencer les propos-libres, je voulus me-lever, pour me-retirer. M.r Parangon (car c’était lui) me-prit entre ſes bras pour me-retenir. Je me-debatis avec tant de courage, que je m’échappai, ét que j’évitai ſes impudentes careſſes. Jugez dans quel embarras je me-trouvais ! L’Hôte ét l’Hôteſſe me tournaient-en-ridicule ſur mes craintes ét mon humeur ſauvage ; ils ajoutaient groſſièrement, que je n’avais-pas-l’air d’avoir-toujours-êté ſi-farouche ; qu’aureſte, on ne me dirait plus rién. Je demandai ma chambre en-pleurant. Je crus-entrevoir que m.r Parangon fesait-ſigne, qu’on pouvait m’y-conduire. Je tremblais dans cette maudite maison. Heureusement on m’avait-donné, pour m’éclairer, une lampe remplie d’huile ; je resolus de veiller toute la nuit, ét de me-barricader dans ma chambre. La precaution n’était pas inutile. Sur les onze-heures-du-ſoir, j’entendis un bruit ſourd à la ruelle de mon lit, Je reculai de frayeur : mais enſuite n’entendant plus rién, j’eus le courage d’y-aler, pour me-raſſurer par mes ïeus. En-tirant un rideau, je me-ſentis ſaisie par des bras vigoureus, ét la lampe me-tomba des mains. Je pouffai un cri perçant ; rién n’arrêta le Miserable, qui me porta ſur