Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/53

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rons ; la portion du bién paternel que nous nous enlèverons mutuellement, ne vaut pas la milième-partie du tresor que l’amitié nous donne dans un-chacun de nos Frères ét Sœurs. Prenons courage, mon Pierre ! les Plus-avancés en-âge aideront les Cadets ; nous-nous ſoutiéndrons tous, comme les Enfans de ce Vieillard, dont je lisais l’autre jour l’hiſtoire : Prêt à ſe-reunir à ſes Péres, il fit-prendre à ſes Fils un faiſceau de petits bâtons, à-peu-près comme nos bottes-de-rouettes, ét 11 leur dit de le caſſer : auqu’un d’eux ne le put ; il le prit enſuite, lui, qui était mourant, ét il caſſa toutes les baguettes les unes après les autres. Belle leçon pour nous ! Notre union ét le bonheur, qu’elle nous procurera, eſt la plus-douce eſperance de notre bonne Mère ; nous ſerions bién-ingrats de ne pas lui donner cette ſatiſſaction ! Je crois pourtant que l’intention de nos chèrs Père ét Mére aurait-êté-mieux-remplie, ſ’ils nous avaient-tous-employés aux travaus-des-champs : une maison comme la nôtre, aurait-valu un hameau entiér ; nous n’aurions-pas-laiſſé un pouce de terrein inculte ; nous aurions-enrichi notre Père de la manière la plus-honorable pour lui ét pour nous : que te dirai-je, mon Pierre ? On m’aurait-donné Laurote, cette petite Cousine du pays de ma Mère, comme on te donnera Fanchon-Berthiér… Mais tout cela n’eſt pas, ét ne ſera jamais pour moi ; il n’y-faut plus penſer.

Je ſuis toujours auſſi-mal avec m.lle  Ma-