Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/80

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me la fesait trouver jolie ! ça me penetrait, ça me flattait, ça me peinait auſſi unpeu ; mais tout-ça enſemble me-fesait un plaisir comme je n’en-ai-jamais-eu. Mondieu ! le joli jeu ! le joli jeu pour l’amour !

Cependant il ſe-fesait tard, ét le ſoleil qui commençait à tomber, en-nous annonçant la fin d’une journée ſi-belle, marquait l’heure de retourner à la Ville, Nous ſommes-partis ; mais comme nous étions quasi au ſommet de la colline, ne voila-t-il pas que les Ruſtauds nous ſont-venus-acoſter, pour nous inſulter ! J’étais entre Edmée ét ſa Sœur, à qui je venais d’aider à monter : Un-d’eux ſ’eſt-approché de moi par-derrière, ét m’a-donné ſur la nuque un coup de revers-de-main. Je ne ſuis pas querelleur ; mais qui me-cherche, me trouve. J’ai-doucement-quitte le bras d’Edmée, ét J’ai-cherché des ïeus le Brutal qui m’avait-frappé : je l’ai-ſaifi ferme ; je ne voulais pas lui faire beaucoup de mal ; après l’avoir-ſecoué un-moment, je l’ai-envoyé tomber à quelques-pas ſur le gazon qui borde le chemin : il ſ’eſt-relevé ſi-pesamment, ét ſi-peu d’à-plomb, qu’il eſt-retombé, ét qu’il a-roulé du haut de la colline en-bas, aux huées de deux mille Perfones. Ses Compagnons l’ont-voulu revenger : ceſt dans ce moment que j’ai-vu l’aimable Edmée ſ’intereſſer à moi ; elle a-employé pour les retenir les plus-douces paroles, ét quasi les larmes. Je ſouriais de ſes craintes, mais elles me-fesaient tant de plaisir,