Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/88

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que vous voyez tout en-beau-. J’ai-ſenti le reproche, ét je n’ai-pu me-defendre d’un peu de honte ; mais j’ai-fait comme les Gens-des-Villes, je l’ai cachée ſous un air deliberé, J’ai-reparti, Que Mademoiselle valait bién Edmée pour la gentilleſſe ; que je ne connaiſſais pas cette Dernière ; qu’il me-ſerait peutêtre-impoſſible de la retrouver, puiſque toutes mes recherches avaient-été juſqu’alors inutiles ; ét que la Première était d’un caractére qui tous les jours me revenait davantage. Oh ! ſi tu avais-vu comme Tiénnette a-rougi, mon chèr Pierre ! Se-douterait-elle que m.lle Manon ſait tout, ét qu’elle m’a-tout-dit ? Elle a-rougi ! elle eſt-coupable ; on ne rougit pas, pour ce que j’ai-dit, ſans des ſujets extraordinaires… J’ai-toujours-continué à parler de m.lle Manon : Tiénnette l’a-louée : elle ne l’aime pas ; ét elle la loue ! mon Pierre, c’eſt qu’elle la craint. Il eſt-pourtant beau de louer Ceux qu’on n’aime pas ! il y-a bién des Gens qui ne ſ’y-plieraient guère, quelqu’interêt qu’ils y-euſſent, moi le premier. Tiénnette a-fait plus ; elle ſ’eſt-attendrie, en-disant : — Je ferais tout pour Mademoiselle ; je la connais auſſibién que vous : mais Madame reviént… Je regretterai toujours Mademoiselle… oui, je l’aime, ét je le prouverai-. Je ne ſais qu’en-dire : je remets à porter mon jugement, lorſque j’aurai-vu ce que j’attens. M.lle Manon viént me-chercher ; elle va partir.

Pierrot ! Pierrot ! comme le monde eſt--