Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/97

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M.r Parangon a-repondu, que oui, ét qu’il était fort-content de moi. M.lle Manon n’a-pas-manqué d’appuyer cet éloge, ét je lui en-ai de l’obligation. — C’eſt mon Protegé, a-repris l’aimable Dame, ét je veus qu’il me-faſſe honneur-. Elle m’a-presenté un Livre magnifiquement-relié, en-me-disant, qu’elle voulait ſeconderle goût decidé qu’on lui avairt-mandé que j’avais pour mon art. Elle-même l’a-ouvert ; ét J’ai-vu que c’était une belle collection de deſſins, copiés d’après les plusgrands Maîtres, tels que Rafael, Michel-Ange, Le-Correge, Le-Titién, Vinci, Buonaroti, L’Albane, les Caracci, Lebrun, Lefueur, Boucher, Vanloo, Vernet, &c.a Je ne ſaurais te dire, mon Pierre, combién je ſuis-ſenſible à ce beau present, dont la main qui me l’a-fait augmente encore le prix.

Après ſ’être-prêtée à l’empreſſement de ſa maison, elle ſ’eſt-montree ſur la porte, ét tout-auſſitôt la ſalle a-été-remplie de Voisins. Oh ! comme elle eſt-aimée ! Mondieu ! le bel éloge que d’être-aimée de tout le monde ! Chaqu’un ſemblait revoir une Fille, une Sœur cherie ; les Jeunesfilles, une Compagne, une Bonne-amie. Enfin, on ſ’est-retiré, pour la laiſſer reposer, ét je ſuis-demeuré ſeul auprès d’elle avec Tiénnettez ; m.lle Manon étant-alée porter à ſa Mêre ét à ſa Sœur cent jolies choses que ſa Cousine avait-deſtinées pour elles.

A-present, mon Frère, je me-demande, comment une Femme ſi-chermante n’a pas tourte la tendreſſe de ſon Mari ? Il eſt-vrai