Page:Rétif de la Bretone - Le Paysan et la paysane pervertis, vol. 1, 1784.djvu/96

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rién de tel ; ſon ſein a une forme, une blancheur, un mouvement que je n’ai-vu qu’à m.lle Manon, ét il eft plus-parfait encore ; ſa main douce, potelée, ſon bras menu, arrondi ſont blancs comme ſa gorge : ét tout-cela en-elle eſt millefois plus-joli que dans les autres Femmes. Ce qui m’a-charmé pardeſſustout, c’eſt ſon ſourire ; c’eſt qu’il reünit ce que j’ai-vu d’enchanteur dans celui de notre Urſule, qui l’a comme tu ſais, dans celui de Fanchon-Berthier, qui l’a ſi-joli, dans celui de m.lle Manon, ét dans celui d’Edmée.

Elle a-demandé à nous voir tous les uns-après-les-autres. Mes Camarades ét Tiénnette m’ont-precedé : ils ont-reçu chaqu’un un present ; Tiénnette, un beau collier, avec des boucles-à-pierre ; Lalgarde, le-plus-ancién des Élèves, une belle tabatiére ; Tintoret une jolie canne à-la-mode. J’étais jalous de l’accueil qu’elle leur fesait, ét je reſtais tout-honteus derrière les Autres. Elle a-baisé deux-fois Tiénnette, en-l’appelant ſa bonne-amie : j’en-ai-rougi d’indignation. Mais je ne ſaurais te tracer un tableau fidèle de ce qu’elle m’a-paru en-careſſant ſa Cousine ; c’était une Deeſſe, je crais, ét m.lle Manon me-ſemblait mille-fois plus-aimable entre ſes bras qu’auparavant. Enfin, mon tour eſt-venu ; je me-ſuis-approché d’un air fi-timide, ſi-decontenancé, qu’elle en-a-paru-frappée. Elle m’a-donné le temps de me-remettre, en-disant à ſon Mari : — Voila donc le jeune Élève -?