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en jeu dans cette refonte de la Constitution qu’on s’explique bien la longueur de ces délibérations. Les Canadiens-Français, qui gagnaient au projet l’autonomie mieux assurée du Bas-Canada, pouvaient craindre en revanche de ne plus tenir, dans l’ensemble de la confédération, la place qu’ils avaient occupée jusque là sous le régime de l’Union. De leur côté, les Anglais assurés d’avoir, dans les futures Assemblées fédérales, une majorité de représentants de leur nationalité, pouvaient craindre que dans le Bas-Canada, où l’élément anglais et protestant forme une minorité respectable, cet élément ne fût opprimé par la majorité française et catholique [1]. Ajoutez à cela que les démocrates, comme M. Dorion, trouvaient — non sans raison — la nouvelle constitution trop monarchique et trop aristocratique, à cause surtout des clauses sur le mode de nomination des sénateurs, sur le droit de veto donné au gouvernement général vis à-vis des décisions des législatures provinciales, etc.

Malgré tout, le projet réunit dans les deux Chambres une importante majorité : 45 voix contre 15 au Conseil législatif ; 91 voix contre 33 dans la Chambre des représentants. Et quoiqu’on eût écarté la proposition d’une consultation populaire faite par les démocrates du Bas-Canada, il est juste de dire que l’opinion publique,

  1. Pour calmer ce qu’il pouvait y avoir de fondé dans ces appréhensions et tout on protestant contre l’imputation de vouloir jamais opprimer une partie de leurs concitoyens, les Canadiens français consentirent à inscrire dans la loi une clause qui interdisait à la législature provinciale de changer les limites de douze comtés représentés au Parlement par des députés d’origine anglaise, à moins que la majorité de ces députés ne consentît à la modification.