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nac, et les suspicions dont il était lui-même l’objet. M. de la Barre, — sur les rapports des Jésuites, — avait déjà écrit au ministère « que c’était l’imprudence de La Salle qui avait allumé la guerre entre les français et la Confédération iroquoise ; qu’il paraissait avoir de mauvais desseins ; qu’il ne fallait pas ajouter foi au récit de ses découvertes ; qu’il était avec une vingtaine de vagabonds, Français et Sauvages, dans le fond de la baie du lac Michigan, où il tranchait du souverain, pillait et rançonnait les gens, exposait les peuples aux incursions des Iroquois », etc. Déjà s’exécutait le « complot meurtrier » dont parle Michelet, qui, tramé à Québec, à Saint-Louis, partout, suivit La Salle en France où il alla se justifier auprès de Louis XIV, et le suivit encore sur la flotte qu’on lui accorda, pour découvrir par mer l’embouchure du Mississipi et commencer la colonisation de la Louisiane. Le commandant de la flottille, M. de Beaujeu, avait en sa femme un jésuite qui surveilla la trahison[1]. Cavelier, débarqué par lui, à cent lieues à l’ouest du point où il voulait aborder, et laissé là, avec des canons sans poudre ni boulets, avec quelques colons affamés et découragés fut tué, comme un chien, dans un bois[2] (1688). « Il se perdit et ne fut plaint de personne », voilà toute l’oraison funèbre que lui consacre encore de nos jours un historien ultramontain, l’abbé Ferland[3] ! : Tantæne animis cœlestibus iræ !

Revenons au Canada. La situation y était grave, non

  1. Michelet, Hist. de France, t. XVII. p. 182.
  2. Ibidem.
  3. Cours d'histoire du Canada, t. II, p. 174.