Page:Réveillaud - Histoire du Canada et des canadiens français, de la découverte jusqu'à nos jours, 1884.djvu/316

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État français librement adjoint aux États-Unis. Elle aurait entretenu avec les États-Unis, Canada compris, des relations commerciales et autres d’autant plus fréquentes et d’autant plus amicales que sur toute la lisière nord de ces États, et plus tard (après l’absorption de la Louisiane) sur la lisière du sud-ouest, elle y aurait retrouvé sa langue et ses mœurs. Qui sait si au lieu de se former en Irlande et en Allemagne, le principal courant d’immigration et de peuplement des États de l’Ouest ne fût pas venu de la France, et si grâce à ce courant une fois établi et alimenté par la fécondité propre, quoi qu’on en dise, à notre race, quand des débouchés lui sont offerts, le tiers, la moitié peut-être des États-Unis d’aujourd’hui ne serait pas l’apanage de la race française et de ses trois branches : canadienne, acadienne et louisiannaise ? Ce que le congrès de Philadelphie disait dans son adresse aux Canadiens fût devenu une réalité. Il en eût été de la grande confédération américaine comme de la petite confédération suisse, où deux et même trois races, parlant des langues différentes, pratiquant des religions diverses, vivent côte à côte dans une parfaite harmonie. L’émulation provoquée par ces différences entre les divers États de la fédération eût profité à la civilisation générale et l’intérêt commun garantissant l’union, en même temps que la large indépendance administrative laissée à chaque État eût empêché les frottements et les froissements, la paix intérieure de la grande République eût été pour des siècles assurée.

Au lieu de cela, qu’a valu aux Canadiens leur confiance trop naïve en la tutelle de l’Angleterre ? À peine la guerre de l’Indépendance était-elle finie que la tyran-