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rendit à Londres où il remua ciel et terre pour tâcher d’obtenir la mise en accusation d’Haldimand. C’est à ce moment qu’il publia son pamphlet : Appel à la justice de l’État. Dans son rude mais éloquent langage, il décrit en traits ineffaçables le sort tragique de son peuple : « Qu’il est triste d’être vaincu s’écrie-t-il ! S’il n’en coûtait encore que le sang qui arrose les champs de bataille, la plaie serait bien profonde, bien douloureuse, elle saignerait bien des années, mais le temps la fermerait. Mais être condamné à sentir continuellement la main d’un vainqueur qui s’appesantit sur vous, mais être esclave à perpétuité du souverain constitutionnel du peuple le plus libre de la terre, c’en est trop ! Serait-ce que notre lâcheté à disputer la victoire, en nous dégradant dans l’esprit de nos conquérants, aurait mérité leur colère et leur mépris ? Mais ce furent les divisions de nos généraux qui les firent battre ; mais nous, nous prîmes leur revanche, et nous lavâmes l’année d’après, le 28 avril 1760, la honte de leur défaite sur le même champ de bataille !… »

Du Calvet n’obtint pas ce qu’il demandait, la mise en accusation d’Haldimand. Toutefois, l’Angleterre, pour donner quelque satisfaction à l’opinion publique, rappela l’autoritaire gouverneur (1785) et, après un court intérim, occupé par le colonel Hope, renvoya au Canada pour l’administrer, l’ex-gouverneur Carleton qui, par l’effet du contraste avec son successeur, était devenu presque populaire sur les bords du Saint-Laurent. Carleton, élevé à la pairie sous le nom de lord Dorchester, arriva à Québec le 21 octobre 1786. L’un de ses premiers soins, suivant les instructions qu’il avait reçues de son gouvernement, fut de nommer des