Page:Réveillaud - Histoire du Canada et des canadiens français, de la découverte jusqu'à nos jours, 1884.djvu/459

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Canadiens se resserraient plus étroitement autour de leurs curés et de leurs congrégations religieuses, et, de la même façon à peu près que l’Église arménienne sert, en face des Turcs conquérants, de boulevard à la nationalité arménienne, l’Église catholique fut considérée par les Canadiens-Erançais comme le palladium de leur indépendance nationale.

Il n’est pas douteux, au demeurant, que la différence de religion, en creusant le fossé entre les anciens habitants français du Canada et les nouveaux occupants de race anglo-saxone, n’ait rendu plus rares et plus tendus les rapports entre les deux peuples et n’ait contribué par suite à conserver plus vivace l’esprit national des Canadiens français. C’est un résultat dont il est sans doute permis à un Français de la vieille France de se réjouir. Mais en retour, il est trop évident que le catholicisme romain a produit, là comme partout, ses fruits ordinaires, en maintenant l’esprit de routine et de réaction, en comprimant la personnalité humaine, en coulant dans un moule uniforme les caractères, en entravant l’essor des libres et fécondes initiatives dans le champ de l’industrie et du commerce comme dans celui des lettres et des sciences.

« Partout, a remarqué M. Émile de Laveleye, le grand économiste belge, partout où, dans un même pays, les deux cultes, catholique et protestant, sont en présence, les protestants sont plus actifs, plus industrieux, plus économes et, par suite, plus riches que les catholiques. » Et le même auteur, après avoir rapporté cette observation d’Alexis de Tocqueville qu’ « aux États-Unis la plupart des catholiques sont pauvres », ajoute, pour le pays dont nous nous occupons, cette