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Page:Révoil - Les animaux historiques.djvu/107

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LES CHIENS DE LA RÉVOLUTION

et sa force. Ce cerbère, nommé Ravage, était chargé, pendant la nuit, de la garde de la cour du préau. Des prisonniers avaient pour s’échapper fait un trou ; rien ne s’opposait plus à leur dessein, sinon la vigilance de Ravage et le bruit qu’il pouvait faire. Le chien se tait ; mais le lendemain matin, on s’aperçut qu’on lui avait attaché à la queue un assignat de cent sous avec un petit billet où étaient écrits ces mots :

« On peut corrompre Ravage avec un assignat de cent sous et un paquet de pieds de mouton. »

Ravage, promenant et publiant ainsi sa vénalité, fut un peu décontenancé par les attroupements qui se formèrent autour de lui, et les éclats de rire qui partaient de tous côtés. Il en fut quitte pour cette petite humiliation et quelques heures de cachot.

« Je fus signalé comme suspect, rapporte une des victimes échappées à la Terreur, et conduit à la Force. Là on me jeta dans la souricière, cachot obscur et incommode, où l’on dépose les prisonniers jusqu’à leur comparution devant le concierge. Au bout de quelques heures, l’on vient me retirer de cet affreux séjour. Je marchais escorté de deux chiens monstrueux. Je fléchis la tête sous dix portes de fer, et traversai ces cours fatales, où tant de victimes avaient péri dans les massacres des 2 et 3 septembre.