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Page:Révoil - Les animaux historiques.djvu/80

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ANIMAUX HISTORIQUES

Un jour que l’on chantait un duo, qui, sans doute l’électrisa, le grison musicophile, transporté, hors de lui-même, quitta son poste accoutumé, entra sans façon dans le salon des concertants, et se mit à braire de toutes ses forces pour exprimer son admiration, ou pour faire sa partie à sa manière.

Le célèbre auteur de Figaro, Beaumarchais dut peut-être à son humanité envers un âne de n’avoir point été massacré. Voici l’anecdote :

Un jour Beaumarchais vit devant sa porte un pauvre grison chargé de légumes, que vendait une jeune fille de campagne ; l’animal n’avait que les os sur la peau, tant il faisait maigre chère. Beaumarchais en a pitié ; il envoie un de ses domestique acheter à la villageoise quelques légumes, fait approcher l’âne de la grille, et lui donne lui-même une botte de foin. C’était dans le commencement des temps révolutionnaires ; quelques moments après, un de ses voisins le prévient qu’on se propose de faire des visites domiciliaires, qu’il est désigné comme suspect ; qu’il ait donc à se tenir sur ses gardes. Beaumarchais se cache dans une armoire. La visite se fait. Un homme seulement entr’ouvre sa cachette, c’est un ami qui lui glisse tout bas ces mots : « On doit revenir cette nuit, sachez ne pas les attendre. » Beaumarchais suit son conseil ; il s’esquive par son jardin, et