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Page:Révoil - Les animaux historiques.djvu/85

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LES CHIENS DU MONT S.-BERNARD

obscurcissent sans cesse les airs de leurs tourbillons. Un petit lac, dont le bassin s’ouvre vers le haut de la montagne, au lieu de répandre la vie et le mouvement dans ces lieux désolés, ajoute encore à leur tristesse. Ses eaux, presque perpétuellement gelées, n’offrent que la blancheur terne de la glace, ou, si parfois le dégel les vient ranimer, elles prennent alors des teintes noires, profondes, qui leur donnent un caractère plus lugubre. Un torrent, le Valtorcy, qui tombe dans le Valais en se creusant d’affreux précipices, trouble seul le silence funèbre de la montagne. La vie animale en est absente comme la vie végétale, et les perdrix blanches elles-mêmes n’aventurent pas à cette hauteur leur course et leur vol. Deux villages, sis à mi-côte, Saint-Rémy, sur le versant italien, Saint-Pierre, sur le versant suisse, marquent les points où commence ce désert tout sibérien. C’est cependant à travers cette effrayante contrée, où tout secours manque à l’homme, et où de redoutables dangers viennent l’assaillir, que se dirige une des deux seules routes qui unissent l’Italie à la Suisse. Le passage est si périlleux, que les anciens eux-mêmes avaient reconnu le besoin de se placer sous la protection de la divinité à avant d’entreprendre le voyage. Un temple, consacré à Jupiter, avait été élevé au sommet du