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les dépaysés

à la fenêtre et me montre une rue qui finit en impasse. Des étrangers, surtout des Italiens, l’habitent.

« Il y a eu ici deux ou trois noces aujourd’hui, me dit-il. En effet, je remarque que la rue a un air de fête. On danse sur les trottoirs au son de la mandoline. Les hommes ont chaud, les femmes parlent et rient haut, les enfants jouent à cache-cache, parmi les groupes. Toute cette populace est heureuse, car elle vit sa vie naturellement comme elle respire. »

« Les disputes des écoles n’inquiètent pas ces gens, me dit Neagle, et ils n’en sont que mieux. »

Il me montre ensuite des peintures. Elles m’intéressent, car j’y vois une heureuse disposition à s’affranchir de tout ce qui est aléatoire dans le passé pour faire un art essentiellement américain. Elles ne sont pas toujours très claires mais elles sont un repos contre ce qui se comprend trop facilement.

Nous ne pouvons pas parler de New-York sans parler de sa vie intellectuelle. On dit que Boston, par ses traditions, est plus cultivée ; mais New-York présente une culture plus diversifiée. L’apport des étrangers y est très considérable. Les Américains importent tout ce qui a un nom et une valeur, c’est pourquoi leurs universités abondent en professeurs de renom, leurs théâtres font entendre les artistes les plus réputés. Les génies français, slaves, italiens et autres créent une atmosphère à part. C’est peut-être la ville au monde qui contient le plus grand nombre de célébrités. N’est-il pas un peu vrai que même nos Canadiens qui se sont fait un nom vont en recueillir les lauriers aux États-Unis ? C’est que les lauriers y sont dorés.

La littérature américaine n’a pas encore atteint le degré de perfection de la littérature européenne.