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Page:Raîche - Les dépaysés, c1929.djvu/89

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les dépaysés

pays est formée par des terrasses séparées les unes des autres par des failles étendues sculptées, de profonds et larges ravins, aux parois verticales.

Nous passons quelques jours à Denver, nous commençons à avoir la nostalgie du pays. Nous décidons de revenir en brûlant les étapes. Cependant Chicago nous retient quelques jours. Nous y arrivons par une chaleur intolérable. La foule défile triste, abattue et fatiguée. Elle va dans cette chaleur comme poussée par une destinée mauvaise. Des panaches de fumée s’élèvent des manufactures obscurcissant la façade des boutiques. De temps à autre le soleil perce cette buée mais il accentue encore l’expression de lassitude de ce peuple. Dans la partie riche d’élégants équipages stationnent aux portes des demeures prétentieuses. L’armée des travailleurs passe sans y prendre garde. On pourrait craindre que ce luxe n’excitât la convoitise. Il n’en est rien. Chez ce peuple démocratique où l’argent ouvre tous les rangs et achète tout, il y a espoir pour tout le monde d’arriver à l’opulence. On dit qu’en Europe, le peuple veut faire descendre les riches à son niveau. Aux États-Unis, les pauvres veulent s’élever au niveau de ceux qui sont parvenus.

Chicago rivalise certainement avec New-York et je ne sais pas s’il ne l’emporte pas sur certains points. Son université est une des plus riches, des mieux outillées et des plus complètes des États-Unis. Son personnel enseignant est d’une rare excellence. Ce qui fait la force des universités protestantes est la supériorité de leurs professeurs. Ils savent qu’elles vaudront ce que valent leurs professeurs, et ne reculent devant aucun sacrifice à l’effet de se procurer les meilleurs. C’est une inspiration et un stimu-