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Page:Rabaut - Le vieux Cévenol, 1886.djvu/68

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misère de la mère d’ambroise.

dit en triomphant Upokritès ; et bientôt l’édit fut exécuté. On ôta à la mère le droit de gérer son bien ; on lui fit une pension aussi modique qu’il fut possible, et, conformément à un autre édit du roi, tous ses enfants lui furent enlevés[1]. On les

    jurisconsulte Bubenbach ne pouvait se lasser d’admirer la beauté de cette loi.

  1. Du mois de janvier 1686, enregistré le 12 de ce mois. — Y a-t-il rien de plus antichrétien et de plus tyrannique, que l’enlèvement des enfants à leurs pères et mères ? Funeste méthode, perpétuée jusqu’à nos jours depuis la révocation de l’édit de Nantes ! Toutes les provinces ont été désolées ainsi ; mais le Poitou, le Languedoc, le Vivarais, le Dauphiné, et singulièrement le diocèse de Bayeux dans la Normandie, en fournissent des exemples récents par milliers. Ces exécutions ont été accompagnées des plus terribles circonstances ; et pour en redoubler l’horreur, et jeter d’autant mieux l’épouvante, ç’a été d’ordinaire pendant la nuit que les grands coups ont été frappés. Je ne ferai point le détail de ces barbaries ; et qui pourrait suffire à les rapporter ? Je ne parlerai que de la seule expédition du sieur Houvet, curé d’Athis en Normandie, et de ses vicaires les sieurs Verger et Grenier. Que l’on se représente ces prêtres suivis de cohortes d’archers, volant de paroisse en paroisse, assiégeant les maisons à la faveur des ténèbres, enfonçant les portes avec des haches, et remplissant l’air de cris affreux, et capables de jeter la terreur dans les âmes les plus intrépides ! Que l’on se peigne leurs satellites entrant après eux, le sabre à la main et le blasphème à la bouche, renversant et brisant tout ce qu’ils rencontrent, jusqu’à ce qu’ils trouvent enfin ce qui fait l’objet de leurs recherches et va faire le sujet de tant de larmes ! Qui pourrait retracer la fureur avec laquelle ils se saisissent de leur proie et l’entraînent sans lui donner le temps de s’habiller, et sans avoir égard aux cris des pères et mères ! Ils ont l’inhumanité de repousser, d’insulter, de frapper ces infortunés pères et mères, qui, se voyant enlever ce qu’ils ont