Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/82

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
74
le tiers livre

Satyres. Choſe que tous deſirent, & peu de gens l’impetrent des cieulx. Par conſequent, coqu iamais : car faulte de ce eſt cauſe ſans laquelle non, cauſe vnicque, de faire les mariz coquz. Qui faict les coquins mandier ? C’eſt qu’ilz n’ont en leurs maiſons de quoy leur ſac emplir. Qui faict le loup ſortir du bois ? Default de carnage. Qui faict les femmes ribauldes ? Vous m’entendez aſſez. I’en demande à meſſieurs les clers, à meſſieurs les preſidens, conſeillers, aduocatz, proculteurs & aultres gloſſateurs de la venerable rubricque de frigidis et maleficiatis[1].

Vous (pardonnez moy ſi ie meſprens) me ſemblez euidentement errer interpretant cornes pour cocuage. Diane les porte en teſte à forme de beau croiſſant. Eſt elle coqüe pourtant ? Comment diable ſeroyt elle coquüe, qui ne feut oncques mariée ? Parlez de grace correct, craignant qu’elle vous en face au patron que feiſt à Acteon. Le bon Bacchus porte cornes ſemblablement : Pan : Iuppiter Ammonien, tant d’aultres. Sont ilz coquz ? Iuno ſeroit elle putain ? Car il s’enſuiuroyt par la figure dicte Metalepſis. Comme appelant vn enfant en præſence de pere & mere, champis ou auoiſtre, c’eſt honneſtement, tacitement dire le pere coqu, & ſa femme ribaulde. Parlons mieulx. Les cornes que me faiſoit ma femme ſont cornes d’abondance, & planté de tous biens. Ie le vous affie. Au demourant ie ſeray ioyeulx comme vn tabour à nopces, touſiours ſonnant, touſiours ronflant, touſiours bourdonnant & petant. Croyez que c’eſt l’heur de mon bien. Ma femme ſera coincte & iolie : comme vne belle petite Chouette. Qui ne le croid, d’enfer aille au gibbet. Noel nouuelet[2].

  1. De frigidis & maleficiatis. Voyez ci-dessus, p.  142, la note sur la l. 4 de la p. 156.*

    *

  2. Noel nouuelet. Ces mots sont le refrain d’un noël, auquel appartient le vers qui les précède.