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almanach povr l’an 1535.

ment les choses aduenir, pource que d’icelles la cognoissance est plus haute & admirable. Parce doncques qu’en cette vie transitoire ne peuuent venir à la perfection de ce sçauoir (car l’entendement n’est iamais rassasié d’entendre comme l’œil n’est iamais sans conuoitise de voir, ny l’aureille de ouyr Eccles. i.) & nature n’a rien fait sans cause, ny donné appetit ou desir de chose qu’on ne peust quelquefois obtenir, autrement seroit iceluy appetit ou frustratoire ou depraué, s’ensuit qu’vne autre vie est aprez cette-cy, en laquelle ce desir sera assouui. Ie dis ce propos, pour autant que ie vous voids suspens, attentifs, & conuoiteux d’entendre de moy presentement l’estat & disposition de cette année 1535. Et reputeriez en gaing mirifique, si certainement on vous en predisoit la verité. Mais si à cettuy feruent desir voulez satisfaire entierement, vous conuient souhaiter (comme S. Pol disoit Philipp. i. Cupio dissolui & esse cum Christo[1]) que vos ames soient hors mises cette chartre tenebreuse du corps terrien, & iointes à Iesus le Christ. Lors cesseront toutes passions, affections, & imperfections humaines, car en iouyssance de luy aurons plenitude de tout bien, tout sçauoir, & perfection, comme chantoit iadis le Roy Dauid, psal. 16. Tunc satiabor, cum apparuerit gloria tua[2]. Autrement en predire, seroit legereté à moy, comme à vous simplesse d’y adiouster foy. Et n’est encores depuis la creation d’Adam né homme, qui en ait traité, ou baillé chose, à quoy l’on deust acquiescer & arrester en asseurance. Bien ont aucuns studieux reduit par escrit quelques obseruations qu’ilz ont pris de main en main. Et c’est ce que tousiours i’ay protesté, ne voulant par mes prognostics estre en façon quelconque conclud

  1. « Je désire mourir et être avec le Christ. »
  2. « Alors je serai rassasié, lorsque ta gloire aura apparu. »