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commentaire

sujet que ne le fait Rabelais lui-même dans le prologue de son Pantagruel y publié d’abord sans date, & ensuite avec celle de 1533 :

« Treſilluſtres & Treſcheualeureux champions, gentilz hommes & aultres, qui voluntiers vous adonnez à toutes gentilleſſes & honneſtetez, vous auez nagueres veu, leu, & ſceu, les grandes & ineſtimables Chronicques de l’enorme geant Gargantua… Et à la mienne volunté que chaſcun laiſſaſt ſa propre beſoigne, ne ſe ſouciaſt de ſon meſtier & miſt ſes affaires propres en oubly, pour y vacquer entierement[1].

« Le monde a bien congneu par experience infallible le grand emolument & vtilité qui venoit de ladicte chronicque Gargantuine : car il en a eſté plus vendu par les imprimeurs en deux moys, qu’il ne ſera acheté de Bibles en neuf ans. Voulant doncques ie voſtre humble eſclaue accroiſtre vos paſſetemps d’aduantaige, vous offre de preſent vn aultre liure de meſme billon, ſinon qu’il eſt vn peu plus equitable & digne de foy que n’eſtoit l’aultre… C’eſt des horribles faictz & proueſſes de Pantagruel[2] ».

Rabelais désigne ici les Grandes Cronicques avec la précision d’un bibliographe, & il faut être bien prévenu pour soutenir qu’il s’agit de son Gargantua, dont le titre est tout différent.

Il existe d’ailleurs, en dehors de ce passage, d’autres indices fort caractéristiques de l’antériorité de publication de Pantagruel, relativement à Gargantua.

Dans Pantagruel, Rabelais, comme « tous bons hyſtoriographes, [3] » commence par donner la généalogie de Pantagruel, &, une fois arrivé à Grandgousier, il ajoute :

« Qui engendra Gargantua,

« Qui engendra le noble Pantagruel mon maiſtre. »

  1. Tome I, page 215 de notre édition.
  2. Tome I, page 217.
  3. Tome I, page 219.