Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/138

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en prie, cessez de pleurer… vous me faites mal !…

— Grâce ! râla-t-elle, ne mettez pas vos yeux dans mes yeux… j’ai honte et j’ai peur… j’aimais mon mari de toutes mes forces, il y a un instant, et je n’avais jamais cessé de l’aimer… puis je vous ai deviné tout à coup si cruellement froid que j’ai perdu la tête… Pourtant… je vous aime… je crois que je vous ai toujours aimé.

Elle s’affaissa complètement, sanglotante, éperdue, avec l’idée qu’elle se noyait et que personne n’était là pour lui tendre la main.

— Berthe, vous n’auriez pas le courage de me redire cela ce soir, à minuit, alors que votre époux vous appellerait, en vain, du fond de ce lit somptueux que vous m’avez permis de voir dans votre chambre. Berthe, m’écoutez-vous ?…

— Si !… j’aurai ce courage… puisque mes coquetteries font place à la honte, puisque je suis vaincue par un démon plus puissant que moi.

Il l’enleva pour l’asseoir sur le fauteuil et, arrangeant ses cheveux, il lui dit très bas quelque chose. Berthe se rejeta en arrière, les yeux fermés…

Quand elle les rouvrit, le comte était déjà loin…

… Jean Soirès avait fait prévenir qu’il ne rentrerait probablement pas de la nuit. Madame Soirès dîna seule, toujours en proie au vertige dont Maxime semblait l’avoir enveloppée. Elle essaya de lire un roman après son dîner, ce lui fut impossible.