Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/229

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nant ses larmes pour ne pas les effrayer, elle rentra chez elle.

— Elle est plus heureuse que moi, la mouette, pensait-elle, à la place de mes livres, de son portrait, de mon désespoir, elle a des petits qu’elle peut caresser.

Devant la porte du pavillon, un gamin de quatre ou cinq ans, vêtu de haillons, mais déjà virilement bronzé par la grève, l’attendait avec une grosse corbeille pleine de coquilles curieuses.

— Ce gamin veut vous vendre des coquilles, c’est le curé qui vous l’envoie, expliqua la Bretonne en le poussant du côté de Berthe.

Celle-ci considéra le vendeur qui avait des cils très épais, un cou rond et ferme, des jambes solides. — Veux-tu aussi m’embrasser ? fit-elle en essayant de le lever de terre.

Il résista, la dame l’intimidait.

Elle garda toutes les coquilles et pria Yvon de faire dîner ce gamin à sa table… il était si gentil !

— Non, dit le petit en se mettant le doigt dans la bouche.

— C’est que sa mère l’attend, Madame, ajouta Yvon un peu embarrassé.

Berthe, probablement plus nerveuse que de coutume, gagna tout de suite sa chambre, la figure dissimulée sous son mouchoir.

— Il était si gentil ! répétait-elle secouée par le frisson d’une douleur inconnue.

Elle refusa de manger et se coucha, le front tourné