Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/230

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vers la muraille. Elle ne voulut même pas sourire une dernière fois au bien-aimé.

— Enfin… qu’y a-t-il de neuf ? demanda Yvon que l’état de la jeune femme tourmentait. Est-ce que ce portrait lui donne du chagrin, à présent ?. … Je vous assure, Anne, qu’elle est folle… une folie douce, si vous voulez… mais elle n’a plus son bon sens. Ça finira mal… Il faudrait que Monsieur vienne la voir… tant pis !… qu’elle meure de l’amant ou du mari, je crois que c’est la même histoire, et le cœur me saigne de la voir dépérir faute d’un mot, faute d’un baiser !… Trop de vertu !… Sacré tonnerre !… une vertu à tout tuer !…

Anne tourna le dos.

— Mêlez-vous de ce qui vous regarde, mon pauvre Yvon, notre maître ne nous paye pas pour lui envoyer des conseils ! Je sais, moi, ce qui la rend dolente… et j’en écrirai à M. le comte… ensuite nous verrons.

Anne devait adresser à son maître un bulletin détaillé de la santé de Berthe toutes les semaines ; ordinairement elle mettait en note les petites imprudences de sa malade et terminait en rassurant le comte sur les désordres de ce malheureux cerveau que l’amour torturait plus qu’une maladie réelle. Cette semaine-là le bulletin fut assez laconique.

« Monsieur le comte, écrivait la Bretonne désormais sûre de ce qu’elle avançait, je dois vous prévenir que madame Soirès est enceinte de trois mois. »

Berthe, ne s’en doutait pas… Maxime, lorsqu’il