Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/27

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héroïques. Il y eut engouement chez les jeunes qui sont braves et ont souffert, plus petite grue, plus pintade ; on disait mon cher et on lui faisait place au café de l’Avenir. Seuls, les Périgourdins, Goudeau, par exemple, lui tenaient rigueur ; le Périgourdin est si prudent !… Elle haussa les épaules.

Elle avait envie de s’amuser, elle avait vingt-quatre ans ! Lutèce, ce journal acerbe, lui consacra quelques articles, à elle une femme, elle une Sociétaire des gens de lettres, jadis patronnée un instant par Houssaye. Ô joie ! un article dans Lutèce, la poignée de main de Moréas qui murmurait « Vous êtes une léoparde très héraldique !… » et l’œil d’un maître vénéré entre tous, Barbey d’Aurévilly, fixé sur elle affectueusement.

Ce fut alors que Monnier accepta Nono. La première entrevue de l’auteur et de l’éditeur fut drôle : Vous êtes donc la marquise de Sade ? » demanda Monnier avec son rire moqueur.

« Oui, » répondit catégoriquement Rachilde, qui avait peur de remporter son manuscrit.

Après Nono, la Virginité de Diane, entre temps Queue de poisson, les Histoires bêtes, puis le procès de Monsieur Vénus en Belgique, pays de la pornographie, où il avait paru. Condamnation de l’éditeur Brancart, descente d’un mouchard chez Rachilde, et douceur du parquet de France, qui, ne comprenant pas le livre, jugea sage de ne pas le poursuivre.

Rachilde, sans rouler sur l’or, eut à manger pour elle, pour son chat noir et son serin jaune.

Camille Delaville ne ferma pas son salon à l’auteur prohibé, Georges de Peyrebrune lui tendit la main, courageusement.