Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/72

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pliquer la décomposition d’une certaine drogue, et elle s’est appuyée, ne pensant plus que sa main était pleine de couleur. D’ailleurs, vous en verrez un peu partout ici !…

Jean se rassura. La glace était rompue : la jeune fille riait.

— C’est impossible, Mademoiselle, vous ne pouvez pas tenir le comptoir d’une teinturerie… jolie comme vous l’êtes… vous devriez penser à vous… à vous marier.

— Je n’ai pas de dot, Monsieur… et maman prétend que les femmes pour se marier ont besoin de dot aujourd’hui.

Dans sa bouche c’était d’une fraîcheur exquise, cette très vieille phrase.

— Et vos cheveux !… murmura Soirès rapprochant son fauteuil.

Elle sourit doucement, le guettant sous ses paupières mi-closes, un peu inquiète, un peu flattée.

Mais tout à coup la main verte sembla remuer. Le pauvre Jean se sentait ensorcelé par cette infernale machine peinte.

— Nous sommes plus riches ; cependant, avoua Berthe, depuis que vous êtes venu, j’ai acheté un mantelet… Elle s’arrêta, se souvenant qu’elle lui devait sa parure ; elle eut une adorable idée.

— Je vais vous le montrer ! dit-elle posant sa broderie.

Et elle le drapa sur ses épaules se plaçant vis à vis de lui pour le faire juge. Elle masquait ainsi la si-