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Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/77

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murmura-t-elle les lèvres tremblantes, je vois que j’avais tort. Je dirai tout avant de me coucher, cette nuit. Voici trois fois que vous m’embrassez et trois fois que vous promettez de demander ma main… je suis-encore très jeune. Vous avez eu de mauvaises pensées… je ne veux plus vous voir… non… Oh ! Monsieur Jean… c’était si gentil de nous marier, dans les chiffons tous les deux, moi teinturière, vous commis du Bon Marché… quel malheur !…

Jean l’entoura de ses bras.

— Cher petit trésor !… ne pleure pas… je reviendrai, je t’épouserai, je te demanderai… je… mais ne me parle pas de ta mère… elle me met en fureur avec toutes ses mains sur les murs… Voyons, est-ce fini ?

Lorsqu’on veut consoler une ingénue, les procédés sont à peu près les mêmes que ceux que l’on emploie pour consoler une vraie femme. Berthe poussa un faible cri et perdit connaissance. Madame Gérond avait retrouvé son manteau. À la vue de sa fille étendue sans mouvements, elle se précipita furieuse.

— Ah ! Monsieur !… Monsieur… une enfant si délicate, que l’on a eu tant de peine à élever !…

Soirès désolé mit l’accident sur le compte de la pièce, vraiment dramatique, et Berthe revenue à elle se garda bien de le démentir.

La situation se tendait. Jean ne pouvait continuer ses tentatives rue Vieille-du-Temple, car Berthe ne voulait plus le recevoir lorsqu’elle était seule.