Page:Rachilde - À mort, 1886.djvu/80

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Je crois que nous allons finir par nous entendre, chère Madame ! continua Soirès d’un air piteux mais se retenant pour ne pas étrangler sa future belle-mère. Je voulais être aimé pour moi… J’ai réussi… au moins en ce qui concerne Berthe. Je possède 60,000 francs de rente et la banque Soirès, plus un hôtel rue de Trévise… Si Berthe préfère les diamants au bleu des écolières vouées, elle n’en manquera pas, je vous en réponds. Maintenant, je vous supplie de hâter notre mariage, car votre sévérité me rend enragé, ma bonne madame Gérond !…

La veuve s’était dressée tout d’une pièce puis, subitement, elle s’affaissa, faisant des prunelles de morte, les bras abandonnés dans ses volants, les jambes raidies.

Il fallut que les deux amoureux se réunissent pour venir à bout de sa terrible syncope. Et des explications échangées, il résulta un attendrissement délicieux, plus une promesse de mariage immédiat.

Ce bonheur n’eut pas tout le retentissement que pouvait lui procurer la fortune. Soirès, très crâne vis-à-vis des gens du Cercle, l’était moins vis-à-vis des incartades de sa belle mère. Après lui avoir alloué une maison toute meublée à Meudon, il redouta sa toilette, le jour de la noce. Il ne fit donc que les invitations nécessaires et n’eut de tranquillité que lorsqu’il fut remonté dans son landau avec sa radieuse petite femme… Désormais, ce trésor lui appartenait … sans colorations nuisibles.

La jeune mariée se tenait droite, n’osant s’ap-