Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/104

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cheveux qui lui battaient toujours les flancs comme la queue d’une bête en folie.

— Monsieur l’abbé, dit-elle froidement, vous ne manquez pas de cœurs dévoués autour de vous.

— Oui, répondit-il sur le ton de la gaieté mais le visage pâle, je n’ai qu’à me louer de l’empressement de mes chères paroissiennes, elles me gâtent… pourtant, il en est qui m’oublient, qui oublient Dieu… ajouta-t-il en une onction feinte.

— C’est sans doute de votre faute, monsieur l’abbé, riposta Laure, lui dardant ses prunelles miroitantes dans les paupières.

Il redressa la tête, la considéra un moment épouvanté, puis il eut l’envie terrible de se lancer sur elle pour la chasser, l’écraser. Laure devina son trouble, elle se pencha :

— Je vais réparer mes torts, monsieur l’abbé, lui glissa-t-elle en une douceur soudaine. Je désire me confesser, et, comme il n’y a plus qu’un curé à Estérac, naturellement je viens vous chercher.

Il était si tremblant qu’il dut s’appuyer contre la balustrade. Personne ne les écoutait ; le train-train du nettoyage de l’autel se poursuivait dans des conversations familières où s’échangeaient les nouvelles du dehors et les événements de la cuisine. L’abbé défaillait sous le regard impérieux de la jeune fille toujours debout, attendant sa décision :

— Je souhaite que ce soit Dieu qui vous ramène ici, mademoiselle répondit-il, passant sa main sur