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Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/105

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son front déjà humide ; je serai à vous dans une heure.

Laure s’inclina et se rendit du côté du confessionnal, en feuilletant son livre de prières d’un air détaché des choses de ce monde.

Les dévotes achevèrent leurs travaux tant bien que mal. Elles empilèrent les pots sur les pots, les roses de papier sur les lis en argent, et elles piquèrent de-ci de-là des bannières de soie qui faisaient ressembler cet étalage rutilant à la devanture d’un de ces marchands forains où le drapeau nous donne le droit de choisir la plus grosse des porcelaines. La Vierge sortait du tas des roses comme une honnête femme, embêtée de vendre une pareille marchandise. Le sacristain remisa saint Georges vers un meuble obscur de la sacristie, les dames méditèrent une minute, le temps de se reposer de leurs fatigues, et se retirèrent en chuchotant quelques invocations pieuses. L’église retomba dans un silence morne. Par le portail ouvert on entendait seulement la plainte lente et nasillarde d’un pauvre agenouillé, sa sébile à la main, qui mendiait avec des chutes de voix gutturales.

L’abbé de Bréville entra au confessionnal, où se trouvait déjà Laure. Dès qu’il eut tiré le guichet, elle lui dit, levant son joli profil vers lui :

— Je vous fais peur, monsieur l’abbé !

Il murmura d’un ton contenu :

— Dites le Confiteor, mon enfant.

— Alors, vous me méprisez ?