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Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/155

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lisés servant les jours de processions, d’étoles chamarrées aux envers de moire blanche, de salin jaune. Deux bannières, celle de Jésus et celle de Marie, formaient ses rideaux ; sa nuque s’appuyait contre la chasuble des Pâques, et elle enfonçait son coude dans la soierie pailletée qu’on tendait sur l’ostensoir durant les cérémonies de l’Adoration perpétuelle.

Quelquefois, s’ennuyant de rester prisonnière, de ne pas y voir, elle ouvrait des écrins, à tâtons, et jouait, trempant ses doigts fiévreux dans les pierres précieuses ; de-ci, de-là, un éclair jaillissait sous le mince rayon d’une fente du bahut, elle tournait et retournait les ciboires, les patènes, les buires, sans scrupule, par une envie naïve de toucher de la verroterie, une enfantine gloire d’être la maîtresse d’objets défendus et de savoir, elle, uniquement, que ces objets ne vivaient pas plus que les autres, qu’ils ne témoignaient pas du tout de leur caractère de vases bénits, rebénits, qu’on n’a jamais le droit de traiter familièrement.

La nuit, elle se levait, sortait de son lit soyeux et se promenait aux étoiles dans la sacristie. Si le prêtre n’avait pas eu la précaution de l’enfermer, elle serait allée grimper sur l’autel pour poser son oreille à la serrure de la formidable et minuscule porte du Seigneur Dieu.

Ah ! c’était un voisin commode, celui-là ! Ni bruit, ni lumière. Il dormait toujours ! La première nuit, elle avait pensé qu’il fallait avoir peur,