Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/169

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gamine, une maternité ridicule plutôt que d’écouler ailleurs le trop-plein de ses baisers…

Moitié soies, moitié fines aiguilles, la boule roulait d’une allure comique d’enfantelet risquant ses premiers pas. Le chaton se dressait, pointait les oreilles, arrondissait le dos, portait haut sa queue, ébouriffée comme une touffe de plumes ; et sa gueulette rose, tel un insecte éternuant, crachait des jurements furieux.

Petit dieu égyptien nouvellement réinstallé sur son trône par le morbide enthousiasme d’une femme triste, il avait la conscience de sa valeur, essayait des malices, se faisait les griffes dans la chair onctueuse de ses bras ou la guettait du coin de l’œil.

Il était, en effet, d’une belle race, pas trop abâtardie par les croisements des stupides angoras aux idées toujours étroites, qui vous ont des mollesses de rois fainéants, sorte d’énervés de Jumièges bons pour le couvent perpétuel. Celui-là descendait plus directement du puissant chat sauvage, le frère du tigre, du chat sauvage qui dégringole sur l’échine d’une gazelle ou d’une biche, et se taille son repas au galop de la chevauchée dans la viande pantelante de sa propre monture. Il avait la tête large, un peu carrée, le crâne d’un jeune penseur, les oreilles droites, minces, dissimulées sous des houppes floches, imitant les cornes faunesques, et, quand il les rabattait, l’ornant d’un bonnet de baby. Sa fourrure était rousse,