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Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/239

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— C’est comme si ton chien mordait le mien, naturellement.

— Vous ne saisissez pas, grand gamin ! J’aime pour de l’amour et non pas pour de l’argent.

— Et moi, mademoiselle, fit l’ouvrier d’un ton contenu, je ne vous servirai pas pour de l’argent ; je vous obéirais pour de l’amour, si je vous plaisais…

Laure demeura pensive. Il lui plaisait.

— Je suis trop mal nippé, hein ? souffla le jeune garçon, essayant de railler encore, le gosier serré par une intense émotion.

— À moins, ricana-t-il, que vous préfériez à mes nippes une belle broche en cailloux du Rhin.

Laura secoua la tête.

— Vous êtes un méchant petit drôle, Auguste.

— J’ai toujours pas des guiches, mademoiselle !

Et, crachant dans ses doigts, il fit semblant de se plaquer des accroche-cœurs aux oreilles.

— Taisez-vous donc !

— Voyons, parlons peu et parlons bien. Qu’est-ce que vous désirez que je fasse, ma petite bourgeoise ?

— Écoutez-moi, Auguste, je veux que cet homme s’en aille le premier.

— Bah ! il vous gêne !

Laure lui saisit les épaules.

— Il a voulu me forcer à le tromper !

— Ah ! bien, si c’en est un, je cogne gratis : j’ai horreur de ces bêtes-là, moi.