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Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/240

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— Mais non, c’est au contraire un très honnête homme, vous ne comprenez pas, il a voulu se débarrasser de mon amour, qu’il trouve encombrant parce qu’il va se marier.

— En voilà une histoire. Et ce monsieur, vous l’aimez… toujours.

— Oh ! je l’aime… moins.

— Il vous entretient, n’est-ce pas ?

— Il est comme mon mari depuis trois ans, mais je n’ai pas besoin de lui, je vous l’affirme.

— Et il dort là-dessous ?…

— Juste là-dessous.

— Il vous laisse courir sans s’informer ?

— Oui.

— Blagueuse !

Et le jeune ouvrier, moitié souriant, moitié vexé, lui envoya un coup de coude.

Laure s’étira, les yeux clos, ramenant la tresse de ses cheveux autour d’elle.

— Puisque tu me trouves jolie.

Auguste Ternisier frissonna, eut la tentation de s’emparer de la tresse qui flottait et tout brusquement se releva.

— Nom de nom, ce que vous vous foutez de moi !… Tenez, j’aime mieux vous fausser compagnie, je dois me réveiller de bonne heure, et vous me donneriez de mauvais rêves. Bonsoir !

Il resta une seconde à la regarder, debout, le regard misant, sa langue léchant ses lèvres de l’air