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Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/279

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pâle rayon de soleil, daignait enfin reprendre les jeux avec de joyeux gestes de rusée, Lion bondissait, déployait ses grâces et avait l’air de s’amuser rien que pour la distraire, elle, sa reine !

Parfois, couché dans le berceau de ses genoux, il posait sa patte, à mouvements réflexes, sur sa main, et, un malicieux sourire flottant dans ses moustaches blanches de vieux penseur, ses deux petits crocs ressortis, le bout de sa langue à peine tiré, recourbé en pétale de dahlia, il avait l’air de lui dire :

— Non, je n’en suis pas un, mais pour la fidélité je les vaux tous.

Parfois, pris d’un délire extraordinaire, la bête s’élançait de la hauteur d’un meuble sur elle, la prenait en traître par derrière, s’agriffait à épaules comme quelqu’un qui essaye de vous renverser, lui mordillait la nuque en poussant des clameurs sauvages où éclataient toutes les imprécations du respectueux amour qui se révolte ; et Laure se sauvait, l’emportant jusqu’à son lit, inquiète de le trouver si puissant, le roulait dans le satin en le fustigeant à coups d’éventail, parce qu’elle en avait eu tout soudainement la terreur, s’était vue à sa merci et sentait son sexe se troubler à ces appels déchirants d’un autre sexe.

Il la flairait aussi plus tenacement aux époques de ses retours de mois, pendant les jours où elle sentait plus fort la femme, se rapprochait davantage de la femelle.