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Page:Rachilde - L’Animale, 1923.djvu/301

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— Allons, c’est bien ! murmura-t-il tranquillement, sans dépit.

Ils redescendirent l’escalier des rochers, cherchèrent leur voiture. Quand ils furent montés, il lui dit d’un accent affectueux, cependant ne la tutoyant plus :

— Où désirez-vous que je vous mène ?

— Je voudrais manger, la tête me tourne, comprenez vous.

Il donna une adresse au cocher, elle entendit nommer le Café Anglais. Devant le restaurant, il évita les groupes sur le trottoir, la poussant toujours avec une impatience mal dissimulée.

Elle soupa, ne perdant ni son temps ni ses bouchées à le remercier de cette aumône. Elle ne fit pas la coquette, ne se passa point la houppette de poudre de riz en se regardant à la glace, ne bouleversa pas les compotiers de fruits, ne gaspilla pas ses morceaux de pain et refusa de s’asseoir sur le divan. Lorsqu’elle eut fiai, lui, qui l’avait étudiée tout le temps sans parler, s’empara de sa main, la contempla dans la paume.

— Vous devez être une amoureuse rare, déclara-t-il, pensant tout haut.

Elle rougit.

— C’est bien possible !

Il cueillit une fleur dans une corbeille et l’aida gracieusement à remettre son manteau. Sur le seuil du café il héla une voiture, mais ne remonta